Londres- Singapour, plus de 12h de vol. 45000 tonnes de carburants dans les entrailles du 747 et me voilà en direction de l'Asie avec d'innombrables pays à survoler toute la nuit.
Le terminal 3 de Londres me parut plutôt vieillot et chaotique. Il y règne une impression de désordre indescriptible. Après avoir été poussées dans la file d'attente comme des bœufs à l'abattoir. Après avoir subi quelques fouilles en passage de sécurité. Je tombe dans l'enfer Duty Free. Un couloir bien dessiné et impossible à éviter vous amène à votre porte d'embarquement non sans avoir traversé un champ de mines de produits alléchants, placés d'une manière stratégique. Parfum, alcool, chocolat de différentes marques, de différents prix avec des affiches 3 pour le prix de 2 écrit en grosse lettre.
N'étant jamais pressé de monter dans ce que j'appelle un tube métallique volant je traine les pas jusqu'à la porte d'embarquement ou une foule impatiente me saute au visage. On scanne ma carte, siège 63k, je suis au pont supérieur business class. Sur ce genre de trajet, le jeu en vaut la chandelle. Être en économie c'est comme passer son corps au pilori. Le prix du billet passe bien le compte en banque au pilori aussi, 3600 euros l'aller simple.
« Have a nice flight » me dit elle de son accent des plus anglais. On embarque les passagers avec enfants. Je me suis toujours demandé pourquoi d'ailleurs. Les enfants embarquent et se dirigent parfois beaucoup plus vite à leur siège.
Certains passagers, qui se croient, être les seuls à bord ,déposent leur valise au milieu du couloir, montent arranger leur coffre à bagage ne se souciant pas de la queue qui s'allonge derrière eux et font leur petite affaire comme à la maison. Comme c'est agaçant !
On me sert un champagne de bienvenue que je continue à demander tout le long du voyage. La programmation des films en avion me fatigue. Quand on décide d'en regarder un, le système audiovisuel fait des siennes. Il y a toujours un problème. Mais, une fois qu'on a compris qu'on est au-dessus des nuages et non au Plaza Athénée ou au Georges V ou même tout simplement dans une chambre d' hôtel. On devient beaucoup moins exigeant.
Le sourire de l'hôtesse fait toute la différence. Elle me sert mon plateau avec élégance et j'avale son élégance avec élégance. La Rillette de poulet, avec un verre de Sancerre, est excellente. Le bœuf Pedang (spécialité asiatique) pour sonner asiatique est pas trop mal des morceaux de poivron jaune rouge et vert décorent le riz blanc, le bœuf épicé relève le goût. En attendant le fromage et le dessert, j'ose regarder le temps de vol restant à parcourir. Les 10h de vols restants me démoralisent. Je ferme l'écran lorsque le petit avion indique Poznan en Pologne.
La chef de cabine se débat comme tous les chefs de cabine du monde, avec le système audiovisuel qui n'en fait qu'à sa tête. Je le savais. Vive le livre ! Je ne voyage jamais sans un bon livre et je vous conseille d'en faire autant.
Quand je me réveille, Singapour me sourit et pleure de tout son corps. Il fait 25 degrés. Il pleut. Le temps est couvert. Passée la climatisation frigorifique de l'aéroport, la chaleur vous saute au visage comme si vous venez d'ouvrir la porte du four de votre cuisine. Les fronts se perlent de sueur, le linge colle à la peau.
Singapour a cette particularité de relier l'Europe à l'Océanie. Il est en effet très difficile de faire un Londres-Sydney sans escale avec au moins une halte à Singapour. Ce qui explique pourquoi Singapour est aussi cosmopolite. Un va-et-vient incessant d'Australiens en route vers l'Europe ou d'Européens en route vers l'Australie.
Singapour a une forte densité de population chinoise, mais aussi on y trouve des Indiens et d'autres nationalités asiatiques des pays environnants, c'est un modèle d'intégration ethnique. On pourrait dire que c'est une perle asiatique avec un dynamisme économique et un brassage multiculturel et religieux. Ici, se côtoient sans problèmes des chrétiens, des musulmans en majorité d'ailleurs et des bouddhistes.
Mais Singapour ne serait pas Singapour sans parler des temples de nouvelles technologies. La majeure partie, de ce qui se fait et se repend sur planète en matière high-tech ,s'y trouve. De véritable building à sept étages où l'on s'y perd dans les marques et les prix et surtout les taux de change. Ce que l'on croit, être moins cher est parfois sensiblement du même prix à la maison. Il faut avoir un œil averti et aussi une bonne connaissance de ce que l'on veut acheter pour ne pas tomber dans le panneau attrape-nigaud.
L'ordre qui règne dans cette ville est parfois dérangeant. Les voitures roulent lentement. Les piétons traversent quand le petit bonhomme est vert et pas avant. Seules les touristes indisciplinées se jettent sur la route puisque de toute évidence aucune voiture ne circule. Aucun papier ou de chewing-gum par terre, au risque de se prendre une amende. Enfin, bref tout semble être réglé dans ce pays où le droit à la grève est interdit. Le politiquement correct peut devenir fort ennuyant. On arrive presque à regretter le côté chaotique de Bangkok et de la Thaïlande.
À en juger le nombre de Food Court et de restaurant qui existent en Asie c'est à se demander si ce peuple cuisine à la maison. J'adore l'aventure. Rien de mieux que de se lancer dans un petit restaurant simple. On me jette quelques morceaux de poulet grillé sur des germes de soja, un bol de riz et une soupe que je n'osai pas toucher. Le goût y est. J'avale cela rapidement pour moins de 10 dollars. On ne peut pas faire mieux.
On peut se permettre de fuir ici les restaurants des grands hôtels qui sont excessivement chers et pas forcément meilleurs. Je remarque un léger problème d'obésité quand même. Ils adorent les McDonald et deviennent de plus en plus potelés.
Les supermarchés sont remplis de victuaille de fruit et de légumes exotiques et de saveur et de couleur à combler yeux, nez et bouche. Je déambule là-dedans. La climatisation des supermarchés est un bon moyen pour se rafraîchir le cerveau cuisant et les vêtements collants à la peau.
Le soir, les lumières des magasins et différents établissements donnent une impression de fêtes en permanence. Impossible d'y échapper. Les expatriés sortent de leur tanière. Ils se rassemblent toujours dans les mêmes bars. Une promenade le long du River Walk confirme mes pensées.
Des serveurs pourchassent les clients dans la rue pour les encourager à gouter des crabes. Je tombe sur un attroupement d'expatriés bouteille de bière ou verre de verre en mains. Les Anglais et les Australiens ici ont tendance à reproduire l'ambiance de chez eux. Ils appellent cela découvrir le monde.
Une fois passé ce brouhaha affligeant, d'autres touristes flânent le long de la baie. Des flashes intempestifs éclairent des visages dans la pénombre. L'hôtel Marina Bay Sand avec son centre commercial, son jardin et sa piscine suspendue à 200 mètres du sol ne finit pas de m'émerveiller. Des jeux laser lui donnent la nuit un effet intersidéral, comme si des martiens venaient nous rendre visite.
Depuis quelques années en assiste à un essor architectural la dernière en date, l'hôtel Marina Bay Sand qui rappelle la folie des grandeurs des Émirats arabes unis.
Quant à l'Hotel Fullerton avec ses colonnes à la grecque. Il fut longtemps la principale attraction. Il me parut bien vieux tout à coup, comparé au Marina Bay. Le petit déjeuner au champagne est excellent pourtant.
L'homme, quel que soit le pays où il se trouve, a le syndrome de Babel. Toujours à vouloir conquérir le ciel en construisant des bâtiments toujours plus fous et plus hauts et toujours plus complexes. Quand on a huit milliards de dollars à gaspiller, on joue à Babylone, on construit 2600 chambres d'hôtel des tables de jeu et des machines à sous.
Je comprends pourquoi dans la bible Jésus Christ s'est mis en colère et a brisé toutes ses tables de jeu. Une des rares fois, si mes souvenirs sont bons où on le décrit en état de colère. C'est une drôle d'idée, cette piscine, à prés de 200 mètres du sol et qui nargue la plus grande piscine au monde : la mer, juste en bas. Le monde est fou.(Dominique Lancastre)
(Publié le 23 avril 2011 Copyright@dominique.lancastre)
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